La repentance, sans culpabilité : Emission Sagesses bouddhistes

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  • Опубліковано 26 сер 2024

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  • @Kanshoji
    @Kanshoji  Рік тому

    Transcription, partie I
    Sagesses Bouddhistes 2022 11 06
    Yashō Valérie Guéneau
    Retranscription Shindo
    Sandrine Colombo :
    Bonjour et bienvenue dans notre émission Sagesses Bouddhistes. Reconnaitre et voir clairement ce que nous faisons à chaque instant en bien ou en mal autour de nous est une pratique bouddhiste particulièrement importante dans la tradition Zen. C’est la pratique de la repentance : voir ses erreurs permet de s’en libérer. C’est ce que nous allons comprendre avec notre invitée Yasho Valérie Guéneau. Nous définirons ce qu’est la repentance au regard de la responsabilité, puis nous verrons comment la pratiquer à un niveau individuel et collectif, et pourquoi cette pratique permet finalement d’acquérir sagesse et compassion. C’est avec joie que nous retrouvons donc notre invitée Valérie Guéneau de votre nom du Dharma Yasho. Bonjour.
    Yasho Valérie Guéneau : Bonjour.
    S. C. : Vous êtes nonne Zen, vous êtes l‘une des responsables du Monastère de Kanshoji établi en Dordogne dans le Périgord Vert, auprès de votre maître Taiun Jean-Pierre Faure. Merci de répondre à nos questions aujourd’hui et notamment sur ce thème de la repentance qui est un thème qui vous est cher. Pourquoi ?
    Y. V. G. : C’est un thème qui m’est cher parce que dans ma vie j’ai pu faire l’expérience de la puissance de cette pratique - par exemple dans des relations conflictuelles, installées depuis longtemps, pour lesquelles on ne trouve pas de solution. À un moment, au bout de plusieurs années j’ai décidé d’arrêter de regarder le problème chez l’autre et de regarder plutôt ma responsabilité dans cette situation. À partir du moment où j’ai commencé à regarder en moi, la situation a commencé à évoluer, tout doucement. À la fin, elle a complètement changé et on est devenus aujourd’hui de très bons amis.
    J’ai pu faire cette expérience à plusieurs reprises dans ma vie. Et puis lors d’un séjour au Japon, j’ai participé à une grande Cérémonie de la Repentance au Temple de Eiheiji, le temple fondé par Maître Dogen, et là ça a été très très fort : j’ai compris, non pas intellectuellement mais profondément corps et esprit à quel point le moi pouvait être douloureux autant pour moi que pour les autres.
    Forte de cet éveil, je suis allée rencontrer un grand maître, le maître de mon maître, Minamizawa Roshi, qui est actuellement l’abbé de Eiheiji et je lui ai posé la question : « j’ai fait ce diagnostic, mais maintenant ? » Parce que je ne me sentais pas du tout libérée de ce moi. Et il m’a répondu : « Asseyez vous en zazen, revenez à une paix profonde. une infinité de causes et conditions n’impliquent pas de culpabilité - et puis : dans chaque activité de la vie quotidienne, pratiquez corps et esprit en unité. »
    S. C. : On va s’intéresser un peu à la définition du mot repentance parce que c’est un mot issu de la culture judéo-chrétienne. Que met-on derrière ce mot, derrière cette notion, dans le Bouddhisme ?
    Y. V. G. : Dans le Bouddhisme il s’agit seulement de voir, voir l’infinité de nos petits dysfonctionnements. Nos grosses erreurs, c’est assez facile de les voir, et si nous ne les voyons pas on nous les pointe. Mais il y a une infinité de petits dysfonctionnements qu’on ne voit pas et qui cependant ensemencent notre conscience. La repentance bouddhiste c’est voir cette infinité de petits dysfonctionnements qui sont nourris par les trois poisons décrits par le Bouddha : l’ignorance, l’avidité, l’aversion. Les voir mais sans faire de commentaires, et surtout sans culpabilité, les voir pour ne pas les suivre, pour s’en libérer.

  • @Kanshoji
    @Kanshoji  Рік тому

    Transcription, partie II
    S C : Alors culpabilité : vous prononcez le mot, qu’est-ce que ça veut dire pour le Bouddhisme ?
    Y. V. G. : Le grand Maître Eno disait : « La culpabilité est un obstacle à l’éveil. » - dans le sens où cette culpabilité peut occuper une partie de notre psychisme et du coup complètement diminuer notre capacité à cette unité, et diminuer également notre capacité à répondre à la situation.
    S. C. : A côté de la notion de culpabilité on peut avoir aussi la notion de responsabilité, qu’est-ce qu’elle signifie dans le Bouddhisme ?
    Y. V. G. : La responsabilité en revanche est très présente, elle est importante. Nous sommes responsables de voir toutes ces pulsions d’avidité et d’aversion qui apparaissent à notre conscience, de les voir autant que possible dans l’instant pour ne pas les suivre - et à ce moment-là notre vie peut devenir bénéfique pour les autres. Quand on réussit par nous-mêmes cette pratique, on donne l’exemple, on peut l’enseigner aux autres et on peut aider l’humanité à évoluer sur ce chemin.
    S. C. : Alors Yasho Valérie Guéneau, on va s’intéresser un petit peu à la façon dont on peut pratiquer cette repentance. Comment s’y prendre pour voir justement ce dont vous parlez, ces petits dysfonctionnements du quotidien ; peut-on donner des exemples ?
    Y. V. G. : Notre pratique racine dans le zen, c’est zazen. Comme le disait Minamizawa Roshi : « Asseyez-vous ! Asseyez-vous pour retrouver dans cette paix profonde cette unité avec la réalité, cette unité avec ce qui est, et se sentir centré. » C’est à partir de là qu’on peut voir à la racine ces pulsion d’avidité et d’aversion apparaître. Lorsque l’on est bien centré, lorsque l’on est bien là, lorsque notre esprit est en paix, on peut les voir et les laisser passer. Mais bien sûr il faut aussi vouloir voir. C’est pour cela qu’il est très important de ne pas ressentir de culpabilité. Si on se sent coupable à chaque fois que l’on voit un de nos dysfonctionnements on ne va pas vouloir aller voir. Il faut donc bien comprendre que cette notion de culpabilité n’appartient pas au bouddhisme.
    S. C. : Il faut repousser cette notion, il faut la comprendre et la repousser ?
    Y. V. G. : Pour comprendre cette notion, dans les grandes cérémonies de la repentance, on chante un extrait du Sutra de Samanthabadra qui dit : « Si une personne souhaite se repentir, laissez-la s’asseoir et méditer sur la véritable nature des choses. », Et ça continue en disant : « Nos égarements sont comme la rosée du matin, évaporée en un instant par le soleil de la sagesse. »
    La véritable nature des choses, nous dit Bouddha, c’est que : « Toutes les existences sont soumises à la loi de l’impermanence et de l’interdépendance. » Toutes les existences, que ce soit mon corps, mes pensées, mes émotions, toutes sont soumises à la loi de l’interdépendance et de l’impermanence.
    Certaines personnes, après avoir fait de grandes erreurs, les gardent à l’esprit toute leur vie, ou de nombreuses années. En fait on doit comprendre que c’est notre mental qui donne corps, qui donne vie à cette erreur passée, mais ici et maintenant elle n’existe plus. Elle est soumise à la loi de l’impermanence et de l’interdépendance, c’est notre mental qui nous empêche de lire cette impermanence et cette interdépendance.
    S. C. : Est-ce que par la repentance on aspire finalement à la pureté ?
    Y. V. G. : L’intérêt de la repentance c’est voir, donc se libérer pour arriver dans la situation suivante avec un esprit ouvert et pur, on peut dire, et ça c’est une pratique de chaque instant. Mais on ne cherche pas à être un être humain pur. L’être humain, jusqu’à sa mort, est soumis aux pulsions d’avidité et d’aversion, et doit pratiquer l’éveil pour s’en libérer.
    Cet attachement à la pureté, c’est quelque chose dont il faut plutôt se méfier. Souvent les personnes attachées à la pureté se donnent beaucoup de règles, se battent avec leurs démons, deviennent parfois rigides, et lorsqu’elles voient leurs imperfections chez l’autre elles les rejettent. C’est important dans la repentance, dans le bouddhisme, de voir nos dysfonctionnements, de voir que comme chaque être humain, nous sommes soumis aux trois poisons - et de le voir chez soi nous donne beaucoup de compassion à l’égard des autres.
    S. C. : Pourquoi dit-on que c’est une pratique essentielle à la Voie?
    Y. V. G. : C’est une pratique essentielle parce que pour guérir il faut faire le bon diagnostic. Si je me crois au sommet je ne prendrai jamais le chemin pour arriver au sommet. Donc c’est en voyant la folie du monde, en voyant ma propre folie que je suis amenée à pratiquer. Quand J’avais 20 ans, quand j’ai commencé à pratiquer, je voyais la folie du monde, je voyais ma propre folie, et je ne savais pas quoi faire dans ce monde. Quand j’ai rencontré zazen, vraiment oui, ma raison de vivre était bien de m’élever un petit peu au-dessus de cette folie et d’essayer d’aider l’humanité à s’élever au-dessus de ces trois poisons.
    S. C. : Parce que quand on voit ses propres défauts, finalement on accepte plus facilement ceux des autres ?
    Y. V. G. : Oui, c’est ça, de les voir chez soi, et bien sûr de les accepter chez soi, ça nous donne beaucoup plus de douceur et effectivement de la compassion pour les autres.
    S. C. : Alors pour conclure, Valérie Guéneau, quelles sont les vertus de cette pratique, finalement, pour soi et pour le reste de l’humanité ?
    Y. V. G. : Par exemple pour soi, quand à un moment je m’éveille à un dysfonctionnement, à un aspect de mon karma, ça se fait parfois dans la douleur ; mais quand je le vois, là je me sens libérée. Pour moi c’est une pratique libératoire parce que ça me donne de l’espoir pour l’avenir, de pouvoir fonctionner mieux à l’avenir. Et au niveau plus collectif, si dans une situation difficile je vois ma responsabilité, plutôt que de toujours accuser les conditions extérieures, accuser l’autre - si j’accepte juste de voir ce qui me revient et essayer de changer pour aller dans une meilleure direction, à ce moment-là, si je réussis cette pratique, je peux montrer l’exemple à mes semblables, à mes frères et sœurs, et de proche en proche, l’humanité peut avancer dans cette direction. Cette repentance c’est vraiment la pratique de l’être humain responsable, faiseur de paix.
    S. C. : Cette notion de paix sera le mot de la fin, Valérie Guéneau, merci infiniment d’avoir répondu à nos questions.
    Y. V. G. : Merci.