Sénèque, Lettres à Lucilius (2/4) : Comment apprivoiser la mort ?

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  • Опубліковано 7 лют 2025
  • Les Chemins de la philosophie
    Émission diffusée le 14.03.2017
    Par Adèle Van Reeth.
    La mort soulève des abîmes de complexité : si la mort n'est rien, pourquoi s'en préoccuper autant ?
    Y a-t-il une recette pour accueillir sereinement la mort ? A priori oui, il est possible de muscler son âme par l'exercice, comme on muscle son corps. Il est possible d'annihiler la peur en côtoyant la mort par la pensée. Mais cette recette demande une préparation opiniâtre et quotidienne, et la prescription de Sénèque est formelle : l'exercice de la philosophie est obligatoire.
    Le texte du jour :
    Épicure ne blâme pas moins ceux qui désirent la mort que ceux qui la craignent et dit : « Il est ridicule de courir à la mort par dégoût de la vie, quand tu mènes un genre de vie qui te pousse à courir à la mort ». Tu peux ajouter à cela et à d’autres propos célèbres du même genre, que l’inconséquence des hommes est si grande, ou plutôt leur folie, que certains sont forcés à mourir par crainte de la mort. Quel que soit celui que tu méditeras, tu fortifieras ton âme à supporter la mort ou la vie ; en effet, dans les deux cas il nous faut nous avertir et nous renforcer, et pour ne pas trop aimer la vie, et pour ne pas trop la haïr. Même quand la raison convainc d’y mettre un terme, ce n’est pas sans réflexion, ni par une fuite en avant qu’il faut prendre son élan. Un homme courageux et sage ne doit pas fuir la vie, mais la quitter ; et avant toute chose, qu’il évite aussi cette passion qui s’empare de beaucoup de personnes, le désir de mourir. Car, mon cher Lucilius, ici comme pour le reste il existe une inclination irréfléchie de l’âme même pour mourir, qui a saisi souvent des hommes magnanimes et d’un caractère très vif, souvent lâches et languissants : les premiers méprisent la vie, les seconds l’ont à charge. Certains hommes, cette même satiété de faire et de voir et, non cette haine, mais ce dégoût de la vie les gagne ; nous y tombons à cause des appels mêmes de la philosophie, quand nous disons : « Jusqu’à quand ces mêmes choses ? Bien sûr je m’éveillerai, je m’endormirai, je mangerai, j’aurai faim, j’aurai chaud. Il n’y a aucun terme, mais dans le monde tous les éléments sont liés, ils fuient et se suivent ; la nuit presse le jour, et le jour, la nuit ; l’été cesse en automne, l’hiver presse l’automne, le printemps serre celui-ci. Tout passe pour revenir au commencement. Je ne fais rien de nouveau, je ne vois rien de nouveau. D’où parfois cette nausée de toute chose ». Nombreux sont ceux capables de juger la vie non pesante, mais superflue. Porte-toi bien.
    Sénèque, Lettres à Lucilius, Sur le chemin de la sagesse, Anthologie des Lettres à Lucilius, traduction Jérôme Lagouanère (Ed.Du Rocher, 2010) p.90-91
    Lectures :
    Sénèque, Lettres à Lucilius, Sur le chemin de la sagesse, Anthologie des Lettres à Lucilius, traduction Jérôme Lagouanère (Ed.Du Rocher, 2010) p.87-88
    Références musicales :
    Valentin Alkan, Marche funèbre, op 26
    Saint Saëns, Koenig Harald Harfagar
    Omer Klein, Spilt milk
    Charles Trenet, Je chante
    Intervenant :
    Jérôme Lagouanère : maître de conférences de langue et littérature latines à l'Université Paul-Valéry Montpellier III.
    Bibliographie :
    Jérôme Lagouanère : Intériorité et réflexivité dans la pensée de Saint Augustin, Institut d'études augustiniennes, 2012.
    Sénèque, Sur le chemin de la sagesse : anthologie des Lettres à Lucilius, du Rocher, 2010.

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