Commentaire frauduleux : 1) Aragon n'a jamais soutenu le Staline stalinien. Dans cette perspective, il faut noter les deux usages qui sont fait de ce mot. Dans un premier temps, soit jusqu'au rapport Kroutchev, le "stalinien" est d'abord celui qui désigne un parti pris pour la défense de la politique de Staline et, au-delà, de la défense des conquêtes sociales de l'Union Soviétique. Et, malgré toutes les dérives, ces conquêtes sont réelles. A partir de 1956, le mot va désigner celui qui reste un défenseur de Staline, malgré les révélations du congrès du PCUS, celui qui figera l'idée de Staline dans un autoritarisme d'une rigidité sans exemple. Aragon ne fut jamais celui-là. C'est pourtant ce que veut faire croire ce commentaire. On pourrait même rajouter qu'Aragon n'a cessé de combattre les dérives de l'URSS, dès avant la mort de Staline. Ainsi, sur le plan littéraire, par exemple il dénonce ce que l'on veut faire dire au "réalisme socialiste", auquel, d'ailleurs, il n'a jamais vraiment adhéré. 2) Le mentir-vrai n'a rien à voir avec la fabulation. Notons d'abord qu'Aragon développe ce concept après l'écriture du Roman inachevé : Le Mentir-vrai (Gallimard 1964) Je n’ai jamais appris à écrire ou les Incipit (Skira 1969). Le "mentir-vrai" dit le passage obligé par la fiction pour dire le vrai. Se remémorant le passé, Aragon nous indique le passage obligé par l'imaginaire dans toute restitution de la réalité. Il y a donc une vraie difficulté à dire le vrai. Mais il n'y a pas de choix possible : pour dire le vrai, il faut nécessairement en passer par la fiction. Nous constatons mentir pour atteindre le vrai. Le réalisme n'est possible qu'à cette seule condition : « Je me répète. Cinquante-cinq ans plus tard. Ça déforme les mots. Et quand je crois me regarder, je m’imagine. C’est plus fort que moi, je m’ordonne. Je rapproche des faits qui furent, mais séparés. Je crois me souvenir, je m’invente. […] Ces bouts de mémoire, ça ne fait pas une photographie, mal cousus ensemble, mais un carnaval. D’ailleurs, je ne m’appelais pas Pierre, c’était l’Abbé Pangaud (et non Prangaud) qui m’appelait Pierre, et pas Jacques. Tout cela c’est comme battre les cartes. Au bout du compte, le tricheur a gardé en dessous l’as de coeur, et celui qu’on appelle un romancier, constamment, fait sauter la coupe. » Le Mentir-vrai, Gallimard 1964. Mais Aragon va aller plus loin. Devant cette difficulté, il va décider de "mentir" en toute connaissance de cause pour tenter de maîtriser cette situation, pour faire du "mentir-vrai" un concept opératoire.
Concernant le stalinisme, Aragon y a adhéré pleinement et défendait même les procès fictifs effectués dans les années 20... il le faisait tout en vers cependant
@@starcade8477 Le Staline des années 20 est effectivement, comme je le dis, soutenu par Aragon. Mais justement, c'est pendant la période où l'URSS sort du Moyen-Âge et des famines. Ce n'est donc pas Staline en personne qui est défendu, mais, que cela plaise ou non, que cela soit caché par ceux atteints d'une cécité idéologique, c’est bien ce qui se passe en URSS. A partir des années cinquante, le soutien d'Aragon est de plus en plus distant, notamment, bien entendu, depuis 1956. Quatre remarques à quelqu'un qui, visiblement, n'a pas lu Aragon : 1) Vous ne trouverez aucun de ses vers qui défendent Staline : AUCUN ; je dirai même que, bien avant 1956, dans ses vers, Aragon dénonce ce qui se passe de problématique en URSS. Par ailleurs, nombreuses sont ses interventions auprès des institutions littéraires et politiques soviétiques qui dénoncent, par exemple, un certain « réalisme socialiste » qui n’a rien de constructif ; je vous informe qu’il s’oppose à Jdanov, président de l'Union des Ecrivains Soviétiques, défenseur d’un réalisme socialiste vidé de toute possibilité d’explorer le réel, mais surtout, qui consiste en l’imposition d’une même esthétique, soit d’un bâillon sur la parole des écrivains ; 2) Dans la publication de son Œuvre poétique, il revient sur les fameux procès des années 20, et, dit-il : « Cela n’est pas sans honte qu’on peut relire cette “prose”-là quarante ans plus tard, quand il faut bien en reconnaître la paternité.» Œuvre poétique VII, page 297 ; 3) En 1965, dans La mise à mort : « Quel désordre, mon Dieu, quel désordre! Il n'y a pas que moi qui ai perdu mon image. Tout un siècle ne peut plus comparer son âme à ce qu'il voit. Et nous nous comptons par millions, qui sommes les enfants égarés de l'immense divorce. » 4) Dans une conférence à la jeunesse, en 1959 : « Il y a ceux qui ont toujours raison : ceux-là, sur leur tombe, on écrira : « Ils connaissaient la vérité, c’est tout ce qu’ils méritent. »
William Cliff, poète et romancier belge a écrit son autobiographie en alexandrin 🙂
Commentaire frauduleux :
1) Aragon n'a jamais soutenu le Staline stalinien. Dans cette perspective, il faut noter les deux usages qui sont fait de ce mot. Dans un premier temps, soit jusqu'au rapport Kroutchev, le "stalinien" est d'abord celui qui désigne un parti pris pour la défense de la politique de Staline et, au-delà, de la défense des conquêtes sociales de l'Union Soviétique. Et, malgré toutes les dérives, ces conquêtes sont réelles. A partir de 1956, le mot va désigner celui qui reste un défenseur de Staline, malgré les révélations du congrès du PCUS, celui qui figera l'idée de Staline dans un autoritarisme d'une rigidité sans exemple. Aragon ne fut jamais celui-là. C'est pourtant ce que veut faire croire ce commentaire. On pourrait même rajouter qu'Aragon n'a cessé de combattre les dérives de l'URSS, dès avant la mort de Staline. Ainsi, sur le plan littéraire, par exemple il dénonce ce que l'on veut faire dire au "réalisme socialiste", auquel, d'ailleurs, il n'a jamais vraiment adhéré.
2) Le mentir-vrai n'a rien à voir avec la fabulation. Notons d'abord qu'Aragon développe ce concept après l'écriture du Roman inachevé : Le Mentir-vrai (Gallimard 1964) Je n’ai jamais appris à écrire ou les Incipit (Skira 1969).
Le "mentir-vrai" dit le passage obligé par la fiction pour dire le vrai. Se remémorant le passé, Aragon nous indique le passage obligé par l'imaginaire dans toute restitution de la réalité. Il y a donc une vraie difficulté à dire le vrai. Mais il n'y a pas de choix possible : pour dire le vrai, il faut nécessairement en passer par la fiction. Nous constatons mentir pour atteindre le vrai. Le réalisme n'est possible qu'à cette seule condition :
« Je me répète. Cinquante-cinq ans plus tard. Ça déforme les mots. Et quand je crois me regarder, je m’imagine. C’est plus fort que moi, je m’ordonne. Je rapproche des faits qui furent, mais séparés. Je crois me souvenir, je m’invente. […] Ces bouts de mémoire, ça ne fait pas une photographie, mal cousus ensemble, mais un carnaval. D’ailleurs, je ne m’appelais pas Pierre, c’était l’Abbé Pangaud (et non Prangaud) qui m’appelait Pierre, et pas Jacques. Tout cela c’est comme battre les cartes. Au bout du compte, le tricheur a gardé en dessous l’as de coeur, et celui qu’on appelle un romancier, constamment, fait sauter la coupe. » Le Mentir-vrai, Gallimard 1964.
Mais Aragon va aller plus loin. Devant cette difficulté, il va décider de "mentir" en toute connaissance de cause pour tenter de maîtriser cette situation, pour faire du "mentir-vrai" un concept opératoire.
Concernant le stalinisme, Aragon y a adhéré pleinement et défendait même les procès fictifs effectués dans les années 20... il le faisait tout en vers cependant
@@starcade8477
Le Staline des années 20 est effectivement, comme je le dis, soutenu par Aragon. Mais justement, c'est pendant la période où l'URSS sort du Moyen-Âge et des famines. Ce n'est donc pas Staline en personne qui est défendu, mais, que cela plaise ou non, que cela soit caché par ceux atteints d'une cécité idéologique, c’est bien ce qui se passe en URSS. A partir des années cinquante, le soutien d'Aragon est de plus en plus distant, notamment, bien entendu, depuis 1956.
Quatre remarques à quelqu'un qui, visiblement, n'a pas lu Aragon :
1) Vous ne trouverez aucun de ses vers qui défendent Staline : AUCUN ; je dirai même que, bien avant 1956, dans ses vers, Aragon dénonce ce qui se passe de problématique en URSS. Par ailleurs, nombreuses sont ses interventions auprès des institutions littéraires et politiques soviétiques qui dénoncent, par exemple, un certain « réalisme socialiste » qui n’a rien de constructif ; je vous informe qu’il s’oppose à Jdanov, président de l'Union des Ecrivains Soviétiques, défenseur d’un réalisme socialiste vidé de toute possibilité d’explorer le réel, mais surtout, qui consiste en l’imposition d’une même esthétique, soit d’un bâillon sur la parole des écrivains ;
2) Dans la publication de son Œuvre poétique, il revient sur les fameux procès des années 20, et, dit-il :
« Cela n’est pas sans honte qu’on peut relire cette “prose”-là quarante ans plus tard, quand il faut bien en reconnaître la paternité.» Œuvre poétique VII, page 297 ;
3) En 1965, dans La mise à mort :
« Quel désordre, mon Dieu, quel désordre! Il n'y a pas que moi qui ai perdu mon image. Tout un siècle ne peut plus comparer son âme à ce qu'il voit. Et nous nous comptons par millions, qui sommes les enfants égarés de l'immense divorce. »
4) Dans une conférence à la jeunesse, en 1959 :
« Il y a ceux qui ont toujours raison : ceux-là, sur leur tombe, on écrira : « Ils connaissaient la vérité, c’est tout ce qu’ils méritent. »