Ces merveilles si magistralement interprétées sont les compagnons de mes jours. Je les écoute dans ma chambre, le regard sur mon magnolia. Si ce n'est pas ça le bonheur, alors, alors, alors!
"Ce qu’il faut de nuit Au-dessus des arbres, Ce qu’il faut de fruits Aux tables de marbre, Ce qu’il faut d’obscur Pour que le sang batte, Ce qu’il faut de pur Au coeur écarlate, Ce qu’il faut de jour Sur la page blanche, Ce qu’il faut d’amour Au fond du silence. Et l’âme sans gloire Qui demande à boire, Le fil de nos jours Chaque jour plus mince, Et le coeur plus sourd Les ans qui le pincent. Nul n’entend que nous La poulie qui grince, Le seau est si lourd." *** Jules Supervielle (1884-1960) - Les Amis inconnus (1934
2 "Grands yeux dans ce visage, Qui vous a placés là? De quel vaisseau sans mâts Êtes-vous l’équipage? Depuis quel abordage Attendez-vous ainsi Ouverts toute la nuit? Feux noirs d’un bastingage Étonnés mais soumis A la loi des orages. Prisonniers des mirages, Quand sonnera minuit Baissez un peu les cils Pour reprendre courage." (Jules Supervielle)
3 Les amis Inconnus "Il vous naît un poisson qui se met à tourner Tout de suite au plus noir d'une lame profonde, Il vous naît une étoile au-dessus de la tête, Elle voudrait chanter mais ne peut faire mieux Que ses sœurs de la nuit, les étoiles muettes. Il vous naît un oiseau dans la force de l'âge En plein vol, et cachant votre histoire en son cœur Puisqu'il n'a que son cri d'oiseau pour le montrer, Il vole par les bois, se choisit une branche Et s'y pose ; on dirait qu'elle est comme les autres. Où courent-ils ainsi ces lièvres, ces belettes, Il n'est pas de chasseur encore dans la contrée Et quelle peur les hante et les fait se hâter, L'écureuil qui devient feuille et bois dans sa fuite, La biche et le chevreuil soudain déconcertés ? Il vous naît un ami et voilà qu'il vous cherche, Il ne connaîtra pas votre nom ni vos yeux, Mais il faudra qu'il soit touché comme les autres Et loge dans son cœur d'étranges battements Qui lui viennent de jours qu'il n'aura pas vécu Et vous que faites-vous, ô visage troublé, Par ces brusques passants, ces bêtes, ces oiseaux, Vous qui vous demandez, vous, toujours sans nouvelles : Si je croise jamais un des amis lointains Au mal que je lui fis, vais-je le reconnaître ? Pardon pour vous, pardon pour eux, pour le silence Et les mots inconsidérés, Pour les phrases venant de lèvres inconnues Qui vous touchent de loin comme balles perdues, Et pardon pour les fronts qui semblent oublieux."
Magnifique...Jules Supervielle, mon poète préféré
Ces merveilles si magistralement interprétées sont les compagnons de mes jours. Je les écoute dans ma chambre, le regard sur mon magnolia. Si ce n'est pas ça le bonheur, alors, alors, alors!
Chantal Cudel pareillement merveilleux ce bonheur
merçi pour jules supervielle, poète pas assez connu et tellement sensible : bonjour aux Amis Inconnus qui liront cela! jacqueline
des voix claires et de magnifiques poèmes mis en en musique avec un rare talent. Les poèmes de Superviellee sont rarement écoutés, merci.
Merci à toi, pour ça, pour moi.
Tres joli
"Ce qu’il faut de nuit
Au-dessus des arbres,
Ce qu’il faut de fruits
Aux tables de marbre,
Ce qu’il faut d’obscur
Pour que le sang batte,
Ce qu’il faut de pur
Au coeur écarlate,
Ce qu’il faut de jour
Sur la page blanche,
Ce qu’il faut d’amour
Au fond du silence.
Et l’âme sans gloire
Qui demande à boire,
Le fil de nos jours
Chaque jour plus mince,
Et le coeur plus sourd
Les ans qui le pincent.
Nul n’entend que nous
La poulie qui grince,
Le seau est si lourd."
***
Jules Supervielle (1884-1960) - Les Amis inconnus (1934
Merci.
merçi
2 "Grands yeux dans ce visage,
Qui vous a placés là?
De quel vaisseau sans mâts
Êtes-vous l’équipage?
Depuis quel abordage
Attendez-vous ainsi
Ouverts toute la nuit?
Feux noirs d’un bastingage
Étonnés mais soumis
A la loi des orages.
Prisonniers des mirages,
Quand sonnera minuit
Baissez un peu les cils
Pour reprendre courage."
(Jules Supervielle)
3 Les amis Inconnus
"Il vous naît un poisson qui se met à tourner
Tout de suite au plus noir d'une lame profonde,
Il vous naît une étoile au-dessus de la tête,
Elle voudrait chanter mais ne peut faire mieux
Que ses sœurs de la nuit, les étoiles muettes.
Il vous naît un oiseau dans la force de l'âge
En plein vol, et cachant votre histoire en son cœur
Puisqu'il n'a que son cri d'oiseau pour le montrer,
Il vole par les bois, se choisit une branche
Et s'y pose ; on dirait qu'elle est comme les autres.
Où courent-ils ainsi ces lièvres, ces belettes,
Il n'est pas de chasseur encore dans la contrée
Et quelle peur les hante et les fait se hâter,
L'écureuil qui devient feuille et bois dans sa fuite,
La biche et le chevreuil soudain déconcertés ?
Il vous naît un ami et voilà qu'il vous cherche,
Il ne connaîtra pas votre nom ni vos yeux,
Mais il faudra qu'il soit touché comme les autres
Et loge dans son cœur d'étranges battements
Qui lui viennent de jours qu'il n'aura pas vécu
Et vous que faites-vous, ô visage troublé,
Par ces brusques passants, ces bêtes, ces oiseaux,
Vous qui vous demandez, vous, toujours sans nouvelles :
Si je croise jamais un des amis lointains
Au mal que je lui fis, vais-je le reconnaître ?
Pardon pour vous, pardon pour eux, pour le silence
Et les mots inconsidérés,
Pour les phrases venant de lèvres inconnues
Qui vous touchent de loin comme balles perdues,
Et pardon pour les fronts qui semblent oublieux."
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