Un film de Gaël MARSAUD
France - 64-min - HD - 16/9 - Stéréo - oct 2024 -Solo vine a ver el jardín (Titre original)
SYNOPSIS : Durant la révolte chilienne de 2019 en plein centre de Santiago du Chili, le Jardin de la Résistance sort de terre. Ces quelques mètres gagnés sur le béton, ont transformé l’ancienne sortie de métro en mémorial pour les disparu·e·s et les blessé·e·s des luttes sociales. Témoin des évènements qui ont marqué le pays après la révolte, cette enclave a tenu par le soin et la ténacité de ses gardien·ne·s. Redevenu une simple sortie de métro, le Jardin de la Résistance n’est plus et son histoire est désormais enfouie sous le ciment. Ce film exhume des fragments de cette mémoire.
Réalisation : Gaël Marsaud
Collaboration écriture et montage : Vania Catalán (alias Pamela Pantoja)
Création sonore et mixage son : Alex Frigoult Rabehasaina
Étalonnage : Thomas Hakenholz
Durée : 64 min
Année : décembre 2024
Production : Primitivi
Format : HDV, 1920X1080
Son : stéréo
Pays de production : France
#Gonzalo Gamboa - interprétation musicale - El Jardín de la Resistencia
LE JARDIN DE LA RÉSISTANCE DANS LE CONTEXTE INSURRECTIONNEL
ET POLITIQUE CHILIEN
Le 18 octobre 2019, le Chili s'embrase. Rejoignant les lycéen·nes, des milliers de manifestant·es descendent dans les rues pour protester contre l'augmentation de 30 pesos du prix des transports en commun. Ce soulèvement historique baptisé Estallido social, secoue les fondations d'un modèle néolibéral instauré sous la dictature de Pinochet. Le Chili, autrefois laboratoire des politiques économiques ultra-libérales prônées par les Chicago Boys, devient le théâtre d'une insurrection populaire s'inscrivant dans un contexte mondial de contestation. 2019, une année charnière après Hong-Kong, la France (des gilets jaunes), l’Algérie, l’Irak, le Soudan, le Liban, Haïti, l’Équateur ou encore la Bolivie, c’est au tour des chilien·nes de se révolter. Une chape de silence se perce littéralement. Il est désormais possible de parler de la dictature, de questionner le modèle néolibéral et la Constitution de 1980 qui érige dans le marbre un tel modèle.
Au cœur de cette révolte, la Place de la Dignité, anciennement Place d’Italie, devient l'épicentre des manifestations. C'est dans ce lieu chargé d'histoire que naît, quelques jours après le début de l'Estallido, le Jardin de la Résistance. À quelques mètres de ce rond-point se trouve la station de métro Baquedano occupée par la police pour surveiller et réprimer la mobilisation. Il se dit qu'en octobre 2019, les manifestant·es ont tellement lancé de pierres sur les policiers postés en contrebas, que le niveau du sol serait monté d'un mètre, fermant progressivement les entrées du métro. Alors que l'Estallido bat son plein et que la police éborgne et tue des manifestant·es, des habitant·es d'une assemblée de quartier décident de venir déblayer les gravats et d'y déposer de la terre. Un jardin de la mémoire prend racine. A côté de chaque pousse venue fleurir le jardin, est jointe une pancarte portant le nom de personnes disparues durant la révolte.
La répression, l’accord visant à changer de Constitution puis le Covid éteindront les flammes de la mobilisation. En novembre 2020, le changement de Constitution est approuvé par référendum. Mais le 4 septembre 2022, contre toute attente, le nouveau projet de Constitution rédigé par des membres de la société civile est massivement rejeté. Celle de 1980 reste en vigueur et les partis traditionnels qui composaient le jeu politique ces dernières années se retrouvent en position de force. Tout un monde passé reste arrimé au pouvoir et avec lui le capitalisme néolibéral de marché, le patriarcat et le productivisme. Autre effet de l'Estallido, le 11 mars 2022, Gabriel Boric, un jeune président de 35 ans, est élu face à l'extrême droite. A peine en poste il droitisera rapidement son discours. Des traités internationaux, à la criminalisation des migrants, en passant par la répression des mobilisations le gouvernement Boric colle aux thèses et à l’agenda d’un mouvement réactionnaire qui prend de l’essor dans tout le pays.
Le Jardin de la Résistance a été le témoin de tous ces événements qui ont jalonné l'après-Estallido social. Il a en même temps accueilli en son sein de nombreux moments militants (Prises de paroles, concert et repas de soutien...). Ses gardien·nes prenaient soin de lui, malgré les attaques incessantes de l'extrême droite et de la police. Peint en blanc par des fascistes, attaqué de nombreuses fois, l'histoire de ce lieu est aussi celle de la ténacité à reconstruire alors que la contre-révolution et les mouvements réactionnaires gagnent en force.
Comme conséquence de ce mouvement de backlash, la mise à mort du jardin lui- même. En décembre 2022, la Municipalité annonce le début des travaux de rénovation de l'accès principal de la station de métro. erclent le jardin de l’intérieur. Les plantes meurent et les travaux débutent.